La location-gérance, pratique courante pour transférer temporairement l’exploitation d’un fonds de commerce, cache des risques juridiques et financiers. Si elle permet de maintenir une activité tout en testant un repreneur, son mauvais encadrement peut entraîner des litiges coûteux. Ce dispositif, encadré par le code de commerce, exige une vigilance accrue pour éviter les pièges liés à la rédaction des contrats, aux obligations légales ou aux conflits entre parties.
Contenu
Comprendre les fondamentaux de la location-gérance
Les obligations légales incontournables
La location-gérance implique une double condition : le loueur doit avoir exploité le fonds pendant au moins deux ans (sauf exceptions pour les héritiers ou cas de force majeure). Le contrat, obligatoirement écrit, doit préciser :
- L’identité des parties et la description détaillée du fonds (biens matériels, contrats en cours)
- La durée et les modalités de paiement de la redevance
- Les déclarations du loueur sur son exploitation antérieure.
Une publication d’avis légal dans un journal habilité est requise sous 15 jours après signature, avec des coûts variables selon le département et la longueur du texte.
Les avantages et les risques d’une telle pratique
Bénéfices :
- Maintien de l’activité sans fermeture du commerce
- Test du potentiel d’un repreneur avant cession définitive
- Perception d’un loyer régulier pour le propriétaire
Risques :
- Perte de contrôle sur la gestion quotidienne
- Responsabilité financière du gérant pour les dettes contractées
- Dépendance à la bonne gestion du locataire
Les erreurs à éviter lors de la rédaction du contrat
La rédaction du contrat : un exercice délicat
Un contrat mal rédigé peut entraîner des litiges interminables. Les clauses vagues ou incomplètes (ex. : absence de précision sur les charges) créent des zones de flou. Exemple : une redevance fixée sans indexation peut devenir inadaptée en cas d’inflation.
Il est également essentiel de clarifier les modalités de gestion des ressources humaines, notamment en intégrant des dispositions sur le calcul du nombre de congés des salariés transférés ou maintenus dans le cadre de la location-gérance.
Clauses essentielles à inclure :
- Calcul de la redevance (pourcentage du chiffre d’affaires, forfait fixe)
- Durée du contrat et conditions de résiliation
- Engagements du gérant (investissements, respect des contrats clients)
- Gestion des salariés et des contrats en cours
Les clauses à ne pas négliger
- Clause de non-concurrence : interdire au gérant d’exploiter une activité similaire à proximité
- Clause de garantie : prévoir une caution pour couvrir les dettes éventuelles
- Clause de révision : permettre une adaptation des termes en cas de changement de circonstances
Les pièges fiscaux et administratifs
La TVA et les locations professionnelles
Les locations de locaux meublés à usage professionnel sont soumises à la TVA (20 %). Cette règle s’applique si le bien comprend du mobilier ou du matériel nécessaire à l’activité. À l’inverse, les locations nues (sans équipement) échappent à cette imposition.
Les formalités administratives obligatoires
- Publication d’un avis légal : coût variable selon le département (ex. : 150 à 300 € en Île-de-France)
- Enregistrement au RCS : le contrat doit être déposé au greffe du tribunal de commerce
- Déclaration fiscale : le propriétaire doit déclarer la redevance perçue
Les conflits fréquents entre propriétaire et gérant
Les litiges liés au non-respect des obligations
Les défauts de paiement de la redevance ou les manquements à l’entretien du fonds sont les causes principales de litiges. Sans clause de résiliation claire, le propriétaire peut se retrouver dans l’impossibilité de récupérer son fonds.
Lorsque des salariés sont concernés, un encadrement insuffisant peut entraîner des conflits juridiques, notamment en cas de licenciement pour inaptitude, souvent causé par un manque d’adaptation ou des conditions de travail mal définies dans le contrat de location-gérance.
La médiation : une solution préventive
Intégrer une clause de médiation dans le contrat permet d’éviter les procédures judiciaires longues et coûteuses. Les parties s’engagent alors à recourir à un tiers neutre pour résoudre les désaccords.
Les bonnes pratiques pour une location-gérance réussie
Sélectionner un gérant compétent
- Vérifier l’expérience : privilégier un candidat avec un historique de gestion similaire
- Analyser la solvabilité : exiger un bilan financier récent
- Prévoir des entretiens réguliers : évaluer mensuellement la performance du gérant
Contrôler régulièrement l’exploitation
- Audits comptables : vérifier la cohérence entre les déclarations et la réalité
- Visites sur site : s’assurer du respect des normes d’hygiène ou de sécurité
- Suivi des contrats : contrôler le renouvellement des fournisseurs ou clients
La location-gérance, bien que pratique, nécessite une rigueur juridique et une vigilance constante. En s’appuyant sur des professionnels pour la rédaction du contrat et en anticipant les clauses critiques, les parties peuvent minimiser les risques. Une surveillance active et une communication transparente entre propriétaire et gérant restent les clés d’une collaboration réussie.